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[Lettre de Denis Moreau à Gaignières, 17 (juillet 1695)]
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Matériau, Technique
Papier
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Original
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Transcription
Du 17
Il est arrivé issi tant de nouvelles depuis hier que, quelque pressé que je sois d'aller au souper de nos princes, je vais vous en faire part. En Catalogne, M. le duc de Vendosme a fait lever le siège de Castel-Foulit aux ennemis. En Flandre vous savez desjà, je croy, que le maréchal de Villeroy a marché à M. de Vaudémont qui ne l'a pas attendu et qui a fait une retraite fort précipitée dans laquelle on luy a défait 4 bataillons. A Namur, où la tranchée est ouverte du 9 au 10, les ennemis ont emporté avec beaucoup de perte un meschant retranchement que M. le maréchal de Bouflers avoit fait faire depuis qu'il y estoit arrivé. A Casal, M. de Carnan a capitulé à ces conditions, sçavoir qu'avant qu'il sorte de la place, les ennemis raseront toutes les fortifications de la ville sans y laisser autre chose qu'une simple muraille sèche sans rampars ny fossés, qu'il fera après cela démolir entièrement la citadelle sans y laisser piere sus piere, que pendant ce temps les ennemis luy fourniront les vivres dont il aura besoin et que lorsque tout cela sera fait on remestra ainsi la ville au duc de Mantoue. Voilà, Monsieur, tout ce que je sçay. Je suis par ma foy tout à vous.
L'armée navalle des ennemis est devant Saint-Malo.
Remarques
Denis Moreau, premier valet de chambre du duc de Bourgogne, collectionneur et ami de Gaignières, constitue l'un de ses principaux correspondants. Ils échangent longuement sur leurs collections de portraits. La Princesse Palatine décrit le cabinet de Moreau dans l'une de ses lettres, datée du 23 mars 1702: "Hier, l'envie me prit de voir l'appartement de M. Moreau. premier valet de chambre de M. le duc de Bourgogne. . . J'y allai au lieu de me rendre au sermon. C'est petit, mais propre et curieux. Il a quatre petites chambres avec des portraits et des tableaux magnifiques (...). Autour des grands tableaux sont pendus des petits, tous de la même dimension : tous les rois de France depuis François Ier jusqu'à notre Roi, et sous chaque roi les grands hommes, guerriers et savants qui ont vécu de son temps. Il a les portraits de tous les poètes depuis cette époque-là jusqu'à la nôtre ; Malherbe a une affreuse barbe : de même il a les maîtresses de tous ces rois et toutes les reines aussi. Il a un cabinet à part pour notre époque, où se trouvent Mme de Montespan. Mme de La Vallière, Mme de Fontange, Mme de Ludres. Il a aussi Mme de Maintenon, habillée en sainte. De plus, toute la maison royale. Puis, rangés par ordre, tous ceux qui ont gagné des batailles : M. le Prince, le duc d'Harcourt, M. de Turenne et M. de Luxembourg. Sous le cardinal de Richelieu, il a mis tous ceux que celui-ci a fait mourir (...). Sous Henri III se trouvent tous les guis-sarts (sic) et tout ce qui a fait figure au temps de la ligue. . . Il possède de belles et précieuses porcelaines et figurines de bronze. Il a aussi M. Lebrun, Mignard, M. Le Nostre, très ressemblant ; Racine, Corneille, La Fontaine, très ressemblant aussi ; tous les jansénistes, Mme Guion. Je voulus qu'il la mette entre M. de Cambrai et M. de Meaux. Il y avait songé, me dit-il, mais il n'avait pas osé le faire. Il a aussi Rablais (sic), qui a l'air très drôle. . . J'y suis restée toute une heure". (Lettres de Madame Palatine, édition Hubert Juin, 1961, p. 201-202).
Bibliographie
Grandmaison (Charles de), "Gaignières, ses correspondants et ses collections de portraits", Bibliothèque de l'Ecole des chartes, t. LII, 1891, p. 183