Transcription
A peine me fus-je séparé de vous, Monsieur, que je tombay malade, deux accès de fièvre, tous deux avec frisson m’ayant pris en une même journée, qui fut celle où j’arrivai à Rouen. Je vis le lendemain madame de Louvoy fort incommodé (sic), mais je faisois selon le proverbe bonne mine à mauvais jeu. Si j’avois différé d’un jour il m’eust esté impossible de dissimuler, une effusion prodigieuse de bile m’aiant tellement safrané tout le corps que jamais soucy n’a esté plus jaune que je l’ay esté pendant 10 à 12 jours. Un dégoût prodigieux accompagné d’un mal de cœur continuel ne m’a point quitté pendant tout ce temps là et je ne fais que commencer à en bien revenir. Tout ce détail de mes incommoditez ne vous est écrit que pour me servir d’excuse auprès de vous, si je n’ay pu comme je l’avois promis vous envoier les épitaphes des lieux par où j’ay passé, à peine me pouvois-je soutenir et il me falloit en arrivant un lict car je n’ay fait que trainer jusqà ce que je sois arrivé icy chez mon frère ou je me suis fait traitter. Je vous diray seulement qu’aiant prié au Bec un frère sculpteur qui y est de me designer et d’écrire tous ceux de cette fameuse abbaye qui y sont en bon nombre, ledit frère me répondit qu’il avoit tout dessigné et envoyé au père Germain avec l’histoire de ladite abbaye admirablement bien composée, et qu’ainsy c’estoit chose inutile d’envoyer derechef audit père Germain ce qu’il avoit déjà, comme c’estoit en son nom que je demandois je n’eus rien à répliquer. C’est à vous, Monsieur, de demander au père Germain les sépultures. Vous en aurez assurément satisfaction. Si je me porte mieux comme je l’espère, vous aurez plus de satisfaction de mes soins.
Je suis toujours avec tout le respect et la reconnoissance possible votre très humble et très obéissant serviteur,
Fr. Antoine Paul Le Gallois
A Vire en Basse Normandie, ce 3 Septembre, j’en partirai pour Rhedon en 2 ou 3 jours.