Transcription
Je sçay la mort de mademoiselle de Guise de mercredy et depuis le moment que je l’ay sçue je cherche celuy de vous demander de vos nouvelles et de vous dire, mon cher monsieur, que je partage avec vous aussy sincèrement et peut-estre plus vivement que personne du monde tous les sentiments que cette mort vous peut donner. Vous avez le cœur trop bon pour n’en estre pas touché et je l’ay trop sensible à tout ce qui vous regarde pour ne l’estre pas infiniment et à vostre douleur et aux projets que tout cecy vous doit faire taire. Une lettre n’est pas propre à en parler, il faut attendre une conversation. Je l’aurois desjà eue s’il ne tenait qu’à moy de l’aller chercher. Vous sçavez combien cela m’est impossible, il me l’a esté aussy de vous écrire plus tost qu’aujourd’huy. J’appris la nouvelle a Marly où je n’avois qu’un seul laquais et personne icy. Nous ne sommes de retour que de samedy au soir, il n’y avoit pas moyen d’envoyer hyer qui estoit dimanche et dans l’incertitude de vostre demeure je n’ay pas voulu me servir de la poste. M. de Valincour me dit hyer matin de vos nouvelles mais j’en veux de plus amples et j’espère que vous viendrez bientost icy où vous m’en donnerez. Mgr le Comte est délogé à cause de la rougeolle du comte de Guiche qui l’a dans son voisinage. Nous sommes dans l’appartement qu’avoit autrefois M. le duc de Bouillon au-dessus de Mgr le duc de Bourgogne. C’est vous demander une visite quand vous viendrez icy et j’espère que vous ne me la refuserez pas. En attendant, donnez-moy je vous prie des nouvelles de vostre santé et soiez persuadé que personne au monde n’y prend plus d’intérest, mon cher monsieur, que vostre très humble et très obéissant serviteur,
L'abbé Girard
La nouvelle d’hyer estoit le retour de M. de Courtanvaux et la survivance de la charge de M. de Tilladet pour luy, elle n’occupera pas assez pour faire oublier le testament de mademoiselle de Guise.